Comme le bar n’est pas très large, cinq supporters s’y accoudent et le reste se répartit autour de quelques tables. Le patron est déjà derrière les pompes, attendant la commande qui ne tarde pas à venir.
- Mettez-nous déjà vingt-cinq pintes, histoire de nous humecter les lèvres…
- Qu’est-ce qui vous amène ici ? demande le patron tandis qu’il remplit les verres à l’affilée.
- Une panne de moteur ! Le car nous a lâché à deux pâtés de maison d’ici…
- J’avais bien compris, mais il n’y a aucun club de foot par ici, et l’autoroute est à dix kilomètres…
- Ah çà ? C’est une autre histoire. Une bien bonne !
- Super, vous allez pouvoir me la raconter. Vous avez bien le temps, pas vrai ?
- Ouais, ouais, c’est sûr, fait le costaud d’un air bougon. Puis, relevant sa casquette, il éclate d’un rire tonitruant que les quatre autres imitent aussitôt.
Le tenancier s’est juste contenté d’un large sourire. Il dispose avec soin cinq bières devant les cinq assoiffés, et le reste dans deux plateaux argentés qui, aux coups et griffes qu’ils portent, donnent l’impression d’avoir fait plus que leur temps. Un coup d’œil à Dambal intime à celui-ci de venir les prendre.
- Et fais gaffe, petit, lance l’un des accoudés. Faut pas gâcher la merchandise…
Dambal, un sourire crispé sur les lèvres, soulève le premier plateau avec autant de précaution qu’un mec qui transporte le service en cristal de sa belle-mère, le buste penché, les mains tenant fermement les bords du cercle métallique.